Jacques des Courtils, fil-social, 15/09/21
L’analyse de différentes études et sondages montre que l’évaluation du taux d’équipement en complémentaire santé s’avère un exercice difficile. Le repère des 95% est Ioin d’être intangible.
Le chiffre, habituellement admis, de 95 % des Français couverts en complémentaire santé reste-t-il exact (96 % pour la Cour des comptes (voir Fil-Social n°35888) ou pour la Drees (voir Fil-Social n°33808) s’appuyant sur des données relevées par l’lnsee en 2017) ? C’est la question que l’on est en droit de se poser au vu de diverses études.
La dernière en date est le fait d’Arcane Research et date de mai dernier mais n’a été rendue publique que la semaine dernière.
Elle indique que « 81 % des Français (18-75ans) déclarent être couverts par une complémentaire (hors complémentaire santé solidaire) » et, « parmi ces 81 %, il s’agit à 56 % d’un contrat individuel et à 40 % un contrat collectif (4 % NSP) ». Il faudrait ajouter à ces chiffres les 7 % de Français, toujours de 18 à 75 ans, qui déclarent être couverts par la CSS. Soit un total de 88 %.
On peut rapprocher ces chiffres de ceux présentés, en janvier 2019, par le cabinet Espy et la Fnim (voir Fil-Social n°28740). Selon cette dernière étude, seuls 90 % de Français (à partir de 18 ans mais sans limite d’âge supérieur) bénéficiaient d’une complémentaire santé.
Autre rapprochement possible, avec une enquête du Credoc, en novembre 2020, qui estimait que 85 % de la population générale disposait d’une complémentaire santé.
Le cabinet Espy estimait que cette différence entre les 90 % et les 95 % couramment admis était la résultante d’un « décrochage net » chez les jeunes (qui passent, depuis les enquêtes précédentes de ce même cabinet de 75 à 66 % de personnes couvertes) et plus particulièrement chez les étudiants (de 85 à 69 %), ainsi que dans les ménages aux revenus modestes (inférieurs à 20 000€ par an), dont le niveau d’équipement passe de 84 à 80 %.
Le Credoc, pour sa part, expliquait que « certains bénéficiaires de la CMU-C pourraient ne pas la considérer comme une assurance mais comme une aide sociale. Mais ce n’est qu’une hypothèse. Quoi qu’il en soit, il apparaît que la population couverte en complémentaire santé n’augmente pas mais stagne, voire diminue ».
Quant à Arcane Research, elle suppose que le fait que son étude ait été réalisée auprès des 18-75 ans, peut expliquer que les chiffres soient différents de ceux de la population totale. Il est vrai que le taux de couverture des personnes âgées est de l’ordre de 98 % selon la Drees.
L’explication du taux de couverture par la CSS (7 %), différent des presque 11 % rapportés par le ministère des Affaires sociales (voir Fil-Social n°35655) pourrait être la même.
Il est en effet assez difficile de comparer ces études. La Drees, en particulier, n’utilise pas les mêmes tranches d’âge et l’année de recueil des données est différente, etc.
Pour autant, selon la Drees, en 2017 donc, la tranche d’âge la moins pourvue en complémentaire (y compris à l’époque la CMU C), était celle des 16/24 ans avec 7 % de non couverts, à comparer avec les 12 % de 18/75 ans de l’étude Arcane.
Une conclusion (provisoire ?) est que le chiffre de 95 % (ou 96 %) de personnes aujourd’hui couvertes en complémentaire santé n’est pas vraiment contesté (sauf par la Fnim et le cabinet Espy) mais on peut penser que la question est ouverte.